De la chaleur de Cambessa à la verdure de Baboulaye: Le destin d’une récidive à l’émigration clandestine

Babacar Gningu
Jeudi 8 avril 2021 - 12:15

« Je m’appelle Babacar NDONGU, 45 ans. J’habite à Dioffior dans le quartier de Ndouk, et je suis père de six enfants (moins de 12 ans). J’ai fait quatre tentatives à l’émigration clandestine entre 2017 et 2020. La dernière en lisse remonte au mois de Février 2020 où je devais moi-même acheminer une pirogue vers l’Espagne à partir de la Guinée BISSAU. A la veille de cette dernière tentative échouée, j’ai quitté Cambessa (Guinée) pour retourner à Dioffior ».

Babacar est très reconnu dans la commune grâce à son engagement et de son amour du travail. C’est précisément en 2015 qu’il est revenu de Dakar et a ouvert un atelier à Moulin à Dioffior, après quelques années passés au port de Dakar. Pour lui, le revenu gagné à travers ses activités était si insuffisant par rapport à ses charges familiales, et c’est ce qui lui avait poussé à tenter la voie de l’émigration clandestine vers l’Europe. « J’ai perdu plus de 2 500 000 Francs CFA (4 500 Dollars US) lors de mes différentes tentatives » dit Babacar.

C’est par l’intermédiaire d’un de ses amis du nom de Babou, que Babacar a eu la connaissance des potentialités de la vallée de Baboulaye, de l’intervention du Projet d’Appui à la Réduction de l’Emigration Rural dans le Bassin Arachidier (PARERBA), et sur les possibilités d’investir dans la culture du riz.

World Vision, dans le cadre du projet PARERBA financé par l’Union Européenne, travaille en collaboration avec l’ISRA (Institut Sénégalaise de Recherche Agricole) sur la récupération des terres salées dans le site de Baboulaye sur un potentiel de 1 000 ha délibéré par la mairie de Dioffior.

Photo de BABACAR GNINGU  Crédit photo Ibrahima Gueye
Babacar est très reconnu dans la commune grâce à son engagement et de son amour du travail.

 

Aujourd’hui après 2 ans d’activités du projet sur le site, il y a un retour des producteurs accentué par un recul de la salinité à travers un cocktail de technologie utilisé sur place.

Ayant bien suivi les conseils de son ami, Babacar a décidé de rester et d’investir dans la riziculture durant la campagne hivernal de 2020. Il a emblavée 1,25 hectares dans la vallée de Baboulaye et il a pu bénéficier de l’appui en semences et techniques du projet mais aussi de l’association « saax diaam » qui lui ont facilité l’attribution de sa parcelle.

Il a également acheté au début de la campagne une décortiqueuse de riz pour élargir le champ d’action de son activité à travers une prestation de service.  « J’ai fait partie des premiers producteurs à récolter du riz dans la vallée et Dieu merci, j’ai obtenu de très bonne récolte dont je n’ai jamais imaginé avoir car c’était la première fois que je pratiquais cette culture. Mes récoltes sont estimées à 3,5 tonnes. Durant cette campagne également, j’ai pu employer 12 personnes qui sont des mères et pères de famille vivant à Dioffior. Ces derniers prennent en charge en moyenne quatre enfants grâce à leurs revenus. Ceci est ma plus grande satisfaction car je suis moi-même un père de famille et beaucoup de personnes comptent sur moi aujourd’hui. Au vu des résultats que j’ai obtenu cette année, je suis en train de solliciter à l’association « saax diaam » de m’octroyer quatre hectares à emblaver pour l’année prochaine. Je compte également valoriser la paille de riz par l’ensilage avec l’appui de l’équipe de World vision pour investir dans l’embouche bovine mais également sur le maraîchage. Je prépare actuellement une campagne d’oignon pour cette contre saison froide. »

Riziere de Babacar
La verdure de Baboulaye

 

Aujourd’hui, l’idée de partir vers l’Europe est derrière moi. D’ailleurs je ne veux plus entendre prononcer le mot « émigration ». Je n’ai jamais su que je pouvais rester et réussir ici à Dioffior si près de ma famille, de mes amis et proches. Maintenant, je sais que c’est possible. Je suis en train moi-même de faire un plaidoyer à mes amis émigrés de venir investir dans la riziculture et dans l’agriculture de manière générale. Je remercie le PARERBA et à toute son équipe à travers ces actions dans le site et d’avoir largement contribué à la récupération de cette base productive indispensable pour la population de Diofior» témoigne Babacar. 

Selon Saint Augustin «le bonheur, c’est de continuer à désirer ce qu’on possède.» L’exemple de Babacar doit inspirer beaucoup de jeunes animés par le sentiment de désespoir à croire en eux mais aussi en s’appuyant sur la potentialité de leurs localités pour réussir.

À propos du PARERBA

Le Projet d’Appui à la Réduction de l’Émigration rurale et à la Réintégration dans le Bassin Arachidier (PARERBA), financé par l’Union Européenne, dans le cadre de la convention de subside entre Enabel/Parerba et World Vision, a pour objectif principal de lutter contre la pauvreté au Sénégal notamment par la création d’emplois pour les jeunes, confrontés au phénomène de l’émigration. World Vision met en œuvre le projet dans les régions de Fatick, Kaolack et Kaffrine pour aider à la création et à la stabilisation des emplois ruraux dans les filières de l’agroalimentaire suivant deux axes stratégiques :

  • Le renforcement de la production et de la commercialisation, pour aider à une véritable création de richesses pour les partenaires bénéficiaires ;
  • Le développement de l’entreprenariat par le soutien aux opérateurs économiques, en amont et en aval des filières agroalimentaires, à travers le renforcement de leur capacité techniques, organisationnelles, l’accès au financement et l’amélioration de leurs affaires.

Cette histoire a été réalisée avec le soutien financier de l'Union Européenne. Son contenu relève de la seule responsabilité du PARERBA et ne reflète pas nécessairement les vues de l'Union Européenne.

Par Ibrahima Gueye, Facilitateur du PARERBA, Fimela