Chemin de retour à l’école après un abandon

«Je faisais la cuisine, le linge, et je nettoyais la maison et parfois je faisais le baby sitting. Pendant ce temps mes patrons étaient dans leurs bureaux et leurs enfants à l’école. Je me suis dit qu’il fallait que je retourne à l’école au village pour avoir la même situation », raconte Codou, 12 ans.
Codou était élève en classe de CM2 à l’école de Reo Mao, un village du département de Bambey situé à plus de quatre-vingt-dix kilomètres de Dakar. Elle a arrêté ses études primaires parce que ses parents n’ont plus les moyens de prendre en charge ses frais de scolarité. Elle était inactive à la maison, ses parents ont décidé de l’envoyer à Dakar pour travailler comme domestique afin de renflouer les finances de la famille.
Dans la même période World Vision, ayant constaté ce genre d’injustices faites aux filles, décida avec ses partenaires de mettre sur pied un projet de maintien des filles à l’école en leur facilitant l’accès à une scolarité.
Certains parents étaient un peu réticents au début car pour eux la place de la femme n’était pas à l’école et d’ailleurs, disaient-ils, « les chances de réussite de la femme sont chimériques face à celles de l’homme qui sont certaines ». Mais après un travail de sensibilisation, ils ont compris que leur manière de penser était anachronique et que la femme était aussi capable que l’homme.
Parallèlement, le programme de World Vision a financé et développé les activités génératrices de revenus et la formation aux bénéfices de deux groupements féminins dont 90 femmes du village. Selon la mère de Codou «avec l’arrivée du projet, j’ai bénéficié d’un financement qui m’a permis de développer des activités génératrices de revenus et d’organiser son retour au village. Depuis j’arrive à subvenir aux besoins scolaires de mes enfants (acheter les fournitures et payer leurs uniformes en début d’année)».
Pour l’inspecteur de l’éducation Gora, l’abandon des filles fut un fléau dans les performances du district qui a plombé les statistiques de maintien, mais avec les activités du projet, ce taux est passé de 35% en 2012 à 48% en 2015. Pour l’équipe pédagogique : « l’exemple de Codou doit être vulgarisé au prés de ses pairs par des séances de plaidoyer et de sensibilisation des populations sur les droits de l’enfant en général et des filles en particulier ».
Avec le programme de la Scofi (scolarisation des filles) qui est une stratégie de l’état pour le maintien des filles un plan de plaidoyer est conçu pour réduire d’avantage les abandons. Pour cela, une sensibilisation énergique doit cibler les élèves et surtout leurs parents afin que tous comprennent que le véritable avenir est dans la poursuite des études.
Codou a finalement pu reprendre sa scolarité et a réussi ses examens d’entrée en sixième et obtenu son premier diplôme de certificat de fin d’étude et raconte :
«Aujourd’hui, c’est moi qui écris et lis les lettres à la maison et j’aide mon petit frère à faire ses devoirs. Je suis plus utile à ma communauté. Je voudrais devenir un docteur, ministre ou présidente. Je demande à toutes les filles du Sénégal et du monde d’aller à l’école et d’y rester pour être demain des décideurs. Je demande aux autorités de nous aider à mieux étudier. Je remercie toutes et tous ceux qui luttent pour l’amélioration des conditions des filles et qui ont facilité mon retour mon retour à l’école».
Crédits Photos: Adama Ndaw