L'art au service de la protection de l'enfant

Jeudi 25 février 2016 - 18:46

Sister Fa est une chanteuse de Hip Hop engagée, à la personnalité forte et l’énergie rayonnante auprès des enfants à qui elle s’adresse. Elle sait trouver les mots qui touchent, mettent les enfants en confiance et libèrent leur parole. Originaire de la Casamance, survivante de la pratique de l’excision, elle prône l’abandon de la pratique depuis plusieurs années.

Ainsi, en partenariat avec World Vision Sénégal, elle a initié en 2013 la caravane « Education sans Excision », qui sera dénommé deux ans plus tard « Education au service de la protection »

Pour la quatrième édition, organisée dans la région de Kolda du 12 au 19 février dernier, Sister Fa animait avec World Vision une série d’ateliers et de forums sur la promotion des droits et la protection de l’enfant. 

Un engagement mutuel fort pour protéger les enfants, promouvoir l’abandon de pratiques culturelles négatives et travailler à la prise de conscience sur leurs effets néfastes, notamment pour les mariages précoces ou forcés, les mutilations génitales féminines, les abus sexuels et la maltraitance, c’est aussi oser aborder des sujets parfois tabous pour dénoncer les abus de toutes sortes dont peuvent être victimes les enfants.

C’est dans ce cadre que World Vision a récemment organisé deux forums dans la région de Kolda, à Dabo et à Dialambéré.

 

A l’ombre de l’arbre à palabres du village se sont rassemblés les enfants, parents, autorités locales, Imams, enseignants, les partenaires et toute la communauté pour échanger sur ce thème de la protection de l’enfant. Des sujets pas toujours faciles à aborder mais autour desquels beaucoup se rejoignent, et grâce au tact du spécialiste de World Vision et à Sister Fa, originaire de la région, peu à peu les mots se libèrent. 

A Dabo une jeune fille courageuse prend la parole pour dire que certains profs devraient arrêter de promettre de bonnes notes pour sortir avec leurs élèves. 

Une femme de Dialambéré remarque que les cas d’abus et de grossesses chez les jeunes ont augmenté depuis que les parents ont démissionné dans l’éducation et le suivi de leurs enfants : « avant aucun père ou mère de famille ne pouvait dormir le soir sans savoir où se trouvait son enfant ».

A Dabo encore, une mère de famille est intervenue pour attirer l’attention sur le problème des extraits de naissance, en tenant responsables les parents de l’abandon scolaire de leurs enfants faute de déclaration à l’état civil. Une négligence qui coûte cher à beaucoup d’enfants, 55% n’ont pas d’extraits de naissance et cela constitue un handicap sérieux car sans ce document au Sénégal il n’est pas possible de passer l’examen scolaire de fin de l’école primaire.

Père de famille, le maire de la commune de Dabo, s’engage devant toute la communauté à mettre fin aux règlements à l’amiable des abus fait aux enfants, surtout en cas de grossesses de mineures : «Il faut mettre le doigt là où ça fait mal et dénoncer ceux qui abusent de nos enfants pour que les sanctions puissent servir d’exemple ».

Après chaque forum, des ateliers avec les enfants les sensibilisent de façon plus personnelle sur leurs droits. Sister Fa anime et fait participer les enfants, les invitant à la réflexion et à une parole vraie sur les droits de l’enfant en général et comment ils se traduisent dans leur vie quotidienne. L’artiste alerte aussi les enfants sur certaines pratiques comme l’excision et les mariages forcés ou précoces. Le dialogue s’engage aussi à travers des activités artistiques comme la peinture ou la réalisation de poupées, une autre façon de s’exprimer et de participer au droit aux loisirs de tous les enfants. Par exemple à Dabo, une jeune fille témoigne que c’est à travers les ateliers de World Vision et Sister Fa qu’elle et ses amis on pu commencer à faire le lien entre certaines maladies telles que les fistules, les difficultés liées à la maternité et la pratique de l’excision. 

Ainsi ces ateliers et forums permettent d’accroître la qualité d’information des enfants et de toute la communauté, de donner matière à réflexion et finalement de faire des liens de causes à effet entre les pratiques et leurs conséquences directes. Un préalable essentiel à la prise de conscience et au changement pour le mieux-être des enfants, la priorité de World Vision.

Et pour clôturer ces journées, l'artiste donnait un concert à Dabo et Dialambéré, pour le plus grand plaisir des petits et des grands

 Photos : Delphine Rouiller