RD Congo : Du travail dans les mines à l'école - L’histoire de Steve

Photo of Steve
Mardi 21 novembre 2023 - 10:16

Par Tatiana Ballay - Communications officer World Vision RDC

Steve est l’ainé de sa famille. Il vit avec sa mère ainsi que son petit frère et ses 3 petites sœurs. Ils habitent au quartier de Kisunka, dans l'est de la ville de Likasi, dans la province du Haut-Katanga en République Démocratique du Congo.

À 13 ans, seul pourvoyeur de revenu pour sa famille

Bien qu'il n'ait que 14 ans actuellement, Steve possède déjà une longue expérience. À la suite du départ de son père, Steve, âgé de 13 ans en 2022, a dû arrêter l’école secondaire et commencer à travailler dans une carrière de concassage artisanal des matériaux de construction. Il y a un an, Il était la seule personne à avoir une source des revenus et supporter cette famille de six personnes.

« Je me levais à 6 heures et je me rendais à la carrière. Je devais trouver une bonne place et passer toute la journée à casser des pierres avec ma massue, dans la poussière. À la fin de la journée, je pouvais remplir cinq sacs, qui étaient vendus à l'unité pour 2000 francs congolais (0,82 USD). Il m'arrivait de vendre cinq sacs en une journée et de gagner 10 000 francs congolais (4,09 USD) » explique Steve, 14 ans.

Abandonner l’école et se lancer dans un travail pénible est l’une de mauvaise expérience vécue par Steve dans son plus jeune âge. Exposé aux intempéries et autres dangers, il se rappelle tout ce qu’il encourait aux côtés des autres enfants travaillant dans les mines.

« Une fois à la maison, j’avais mal partout et je devais reprendre le lendemain. C'était une grande tristesse, les sacs étaient tellement lourds. Cet argent nous suffisait à peine pour nous nourrir. Il y avait des enfants qui tombaient malades tout le temps. » ajoute-t-il

Élevé par une mère au cœur solide

Mère de 5 enfants, Mireille a dû faire de son mieux et faire face à une vie qui venait de basculer après le départ de son mari.

« Mon mari nous a abandonnés il y a trois ans pour refaire sa vie à Pweto » confie Mireille, la mère de Steve.

Pour subvenir aux besoins de sa famille après l’abandon de la famille par son mari, cette femme s’est vu obligée de déléguer une partie de ses responsabilités à son enfant à cause des mythes.

Le travail dans les mines est le plus accessible pour la plupart des membres de la communauté. Interdites d’accéder dans les sites miniers à cause des croyances traditionnelles, les femmes comme Mireille n’y accèdent pas au motif de rendre improductive la carrière. La maman de Steve a été obligée de laisser son fils travailler malgré son âge suite à ce mythe tant propagé dans cette région.

« D'après nos coutumes, les femmes n'ont pas le droit de se rendre à la carrière et de travailler. Notre culture considère les femmes comme impures et leur présence dans une carrière peut causer du malheur. Ba nioka Ba Majiba, c’est ainsi qu’on nous appelle. C'est la raison pour laquelle mon fils y a travaillé à ma place. J'attendais à l'extérieur qu’il revienne avec les sacs de moellon et gravier, et je l'aidais à les vendre. », explique Mireille

World Vision appuie la protection des enfants

World Vision RDC appuie le Gouvernement congolais dans la protection des enfants dans la Province du Haut-Katanga à travers un système de sensibilisation communautaire, avec un ensemble d'interventions spécifiques. Ces activités visent à renforcer les mécanismes de protection de l'enfance au niveau communautaire, pour lutter contre les abus, la négligence, l'exploitation et d'autres formes de violence contre les enfants. 

En 2023, 507 enfants en rupture scolaire et dont la plupart travaillent dans des carrières ont été sensibilisés et conscientisés sur leurs droits et le besoin de retourner à l'école.

Seuls 30 ont retourné repris le chemin de l’école scolaire et deux enfants ont pu être sortis des carrières, dont l’enfant Steve. Steve est de retour à l'école depuis près de 8 mois et s’adapte peu à peu avec l’accompagnement du RECOPE. Steve rêve finir ses études, trouver un travail et prendre soin de sa famille.

A Kisunka, le Réseau Communautaire de Protection de l’Enfance appuyé par World Vision encourage les enfants à rester assidus et achever leur parcours scolaire.

Le travail des enfants dans les mines et carrières d’exploitation artisanale reste un défi majeur en République Démocratique du Congo.

World Vision s'est engagée à soutenir le gouvernement congolais pour éradiquer ce fléau depuis 2016, à travers sa campagne de lutte contre les pires formes de travail des enfants. Cependant, les ressources sont limitées face à l'ampleur du problème. Il y a un besoin énorme de plus des ressources pour mettre fin au travail des enfants.

À ce jour, aucune étude quantitative récente n'a fourni de précisions sur le nombre d'enfants impliqués. En 2014, les estimations ont montré que le nombre d'enfants travaillant dans les mines et carrières artisanales était d'environ 40 000, dont une grande partie se trouvait sur la ceinture de cuivre et de cobalt dans le Haut-Katanga et dans le Lualaba.

Environ 143 000 enfants de 5-17 ans, soit 24%, sont impliqués dans des travaux domestiques ou économiques dépassant les seuils horaires recommandés.