Améliorer les moyens de subsistance

Jeudi 30 juin 2016 - 15:19

Les femmes de confession chrétienne et musulmane du district de Kaffrine/Fatick, dont la vision du monde diffère, ont une caractéristique commune dans leurs préoccupations quant aux moyens de subsistance : chacun de ces groupes souffre de limites en termes de potentiel économique, opérant à des niveaux différents de leurs capacités. L'accès aux facilités de crédits proposées par les institutions de microfinance classiques s'est avéré limité, sans compter les taux d'intérêt rédhibitoires et autres conditions difficiles imposées par les institutions financières. Outre ces difficultés, les femmes devaient systématiquement effectuer un trajet de 140 km entre leur district et Dakar, où se trouvent les institutions financières.

Le projet d’Amélioration du témoignage chrétien au Sénégal (ATCS) a permis de changer la donne pour les femmes de la région de Kaffrine/Fatick en facilitant la création d'une Association villageoise d’épargne et de crédit (AVEC) pour ces deux groupes de femmes. Le projet a amélioré la coopération entre les chefs religieux chrétiens et musulmans, a contribué à faire tomber les barrières liées aux idées fausses et aux préjugés et a permis d'éliminer certaines contraintes et obstacles s'opposant au développement des moyens de subsistance des femmes de ces deux confessions. Une AVEC composée de 20 femmes a été créée dans la région, et ses membres se réunissent une fois par semaine pour y acheter des parts à un prix déterminé par les femmes elles-mêmes, en fonction leurs propres capacités. Chaque femme membre est autorisée à acheter de une à cinq parts par semaine, et le produit de ces parts est octroyé sous forme de crédit aux membres qui en ont besoin pour mener à bien leurs activités. Le crédit accordé aux membres a un faible taux d'intérêt, et le cumul de celui-ci est reversé aux membres en fin d’année sous forme de dividendes des parts vendues.

Madame Lobe Mbengue, présidente de la Commission Transformation CDE Naqq Jerinu et membre de l’AVEC de Gainth Gouye, ADP de Kathiotte, fait le récit, similaire à celui de la plupart des membres, de son expérience avec le groupe de femmes : « Avant l'introduction de l’AVEC, notre capacité d'épargne était très faible, voire inexistante. Aujourd'hui, après six mois de travail, j'ai épargné près de 35 000 F CFA et ma capacité d'emprunt excède 100 000 F CFA. En outre, l'accès au crédit est plus simple pour moi. Avant le commencement de ce projet, j'ai effectué plusieurs aller-retours entre mon village et l'institution financière qui se trouve à Kaffrine, ce qui a engendré pour moi des dépenses supplémentaires. Aujourd'hui, grâce à notre AVEC, je n'ai pas besoin de sortir du village pour avoir accès au crédit. Une partie des intérêts que je verse pour le prêt octroyé par l’AVEC me sera reversée quand le fonds sera partagé ».

Poursuivant son récit des avantages supplémentaires procurés par cette approche, elle affirme ce qui suit : « Par le passé, il m'est arrivé d'avoir recours à des prêteurs qui n'ont pas hésité à m'exploiter financièrement. Aujourd'hui, notre AVEC est mon unique outil de financement. Mon fonds a augmenté de manière substantielle et j'avais davantage de bénéfices. Je vous donnerai un exemple, mon dernier crédit obtenu de l’AVEC s'élevait à 100 000 F CFA. Avec ce capital, tous les dimanches, je réalise en moyenne un profit de 15 000 F CFA en allant au marché hebdomadaire de Birkelane, ce qui représente pour moi un profit mensuel moyen de 60 000 F CFA. Après déduction des intérêts mensuels sur le prêt, s'élevant à 10 000 F CFA, il me reste un profit net de 50 000 francs par mois, sans compter ce que j'ai gagné avec mes autres clients. Au niveau social, le fonds a permis de renforcer les relations entre les membres et un nouveau type d'assurance est né avec le fonds de solidarité. Tous les membres ont connu une amélioration financière sous forme de trésorerie nette et peuvent donc mieux prendre soin de leurs enfants ».

 Dibs Sagne, membre de l’AVEC de Fatick, corrobore les avantages présentés par la nouvelle innovation introduite par le biais de l’AVEC : « Le projet d’AVEC est très flexible et est autogéré par le groupe. Il nous a, dans une large mesure, libéré d'une pression considérable. Nous sommes tous impliqués dans le commerce et l'élevage de petit bétail. J'en profite également pour parler de ce que le fonds de solidarité a fait pour le groupe. Dans le cadre des réglementations fixées par le groupe, les plus désavantagées d'entre nous bénéficient d'un soutien alimentaire. Nous nous sentons plus fortes. À l'heure actuelle, il y a une grande affection entre les membres du groupe et nous partageons mutuellement les fardeaux qui nous accablent. Je suis vraiment ravie et je veux remercier les facilitateurs de WV qui nous ont accompagné tout au long de ce processus ».

Les moyens de subsistance arrivent en tête de liste des préoccupations de toute communauté, et la pression pesant sur les femmes consistant à vivoter avec des finances limitées a été un souci considérable pour toutes. Le projet d’ATCS, en facilitant la création de l’AVEC, a permis la transformation des femmes dans la région du projet grâce à un accès aisé à des fonds mobilisés en interne et des profits accrus. Il permet donc aux femmes de chacune des confessions de la région du projet de jouer un rôle majeur dans l'entretien de leurs enfants, contribuant ainsi dans une large mesure au bien-être de ces derniers.

Auteur: Jean de Dieu N'Gouala, Coordonnateur du projet Foi et Développement